POST-MORTEM
Apprendre à vivre avec la mort de l’autre. Continuer à lui parler. Lui donner vie. Jasmina Douieb n’a pas su le faire après le décès de sa mère. Où la trouver quand il ne reste d’elle que quelques poussières dans l’air ? En rencontrant des personnes qui communiquent avec leurs morts, interprètent les signes et vivent des deuils « réussis », Jasmina cherche le chemin de son propre deuil.
« Ma mère a eu le cancer, elle est morte et je dois apprendre à vivre avec ça. On a dispersé ses cendres dans un champ. Les cendres se sont envolées. Je ne sais pas bien si je dois regarder le champ ou dans le ciel… Du coup, y a pas de lieu. En moi non plus d’ailleurs, y a pas de lieu. Je ne lui parle jamais. Je ne la trouve plus, ma mère. Je ne comprends pas où elle est passée. Faudrait moi aussi que je lui parle. Mais je ne sais pas comment on fait. »
Pour ce « seule-en-scène » caractérisé de « théâtre verbatim documentaire à partir d’interviews audio », Jasmina Douieb est partie en quête de tous les moyens que les personnes ont développé pour entrer en contact avec leurs morts. En faisant davantage confiance aux signes, elle convoque sur scène les morts, crée des connexions entre eux, génère de nouvelles histoires. Écrire un spectacle sur les morts, les faire parler, jouer, exister, n’est-ce pas comme les prolonger ?
Jasmina Douieb envisage la création de ce spectacle comme une quête de tous les moyens que les gens ont développés pour entrer en communication avec leurs morts, pour faire un spectacle sur celleux qui y arrivent.
En peuplant la scène de morts qu'elle ne connait pas, en créant des bifurcations et des ponts, une matrice narrative va peu à peu prendre forme, et les morts, ces morts vont se mettre à dialoguer entre eux.
Parler des morts, parler avec eux, puis les jouer, les faire exister, les vivifier. Ecrire un spectacle sur les morts, et de manière indirecte sur la mort de sa mère, ce sera faire acte de prolongement et créer à partir d’eux. Comme Roland Barthes qui retrouve un peu de la nourriture que sa mère faisait en la faisant lui-même…
Ce sera donc un spectacle qui sera générateur d’histoires et libérateur de paroles.